ESPAGNOLE

LITTÉRATURE ESPAGNOLE

JAUME CABRÉ
Quand arrive la pénombre
Éditions Actes Sud (janvier 2020)

La sortie d'un livre de Jaume Cabré est toujours un événement.

L’auteur de l’inoubliable chef-d’œuvre Confiteor dont je vous ai déjà parlé et que vous pouvez retrouver sur mon site dans la rubrique "Littérature Espagnole" (cliquer ici) nous revient avec un recueil de 13 nouvelles Quand arrive la pénombre.
Après Voyage d’hiver paru en 2017 dont le fil rouge était la musique, ce nouveau recueil a moins d’homogénéité.
Nous passons d'une nouvelle sur un meurtre, à une nouvelle sur l'art pictural avec une dimension fantastique... Toutefois on pourrait dire que le Mal est le personnage principal de ce livre.

Jaume Cabré, une fois de plus, ne nous déçoit pas, même si certaines de ces nouvelles sont moins fortes que d’autres. À tout le moins pour ceux qui n’ont pas la chance de connaître son œuvre romanesque et en particulier Confiteor que je vous invite à découvrir de toute urgence, ce recueil de nouvelles est une façon de vous immerger dans l'univers tout à fait remarquable de Jaume Cabré. Vivement son prochain roman.

LLUÍS LLACH
Le Théâtre des merveilles
Éditions Actes Sud (mai 2019)

Mais quel roman solaire, quel plaisir de lecture ! Je vous invite à un voyage merveilleux et musical.
On va vous parler de la vie et de la mort d’un théâtre, de crime passionnel, d'amours interdits, du feu sacré de la vocation, des années de guerre civile et de dictature.
L'auteur, avec une légèreté de ton malgré les sujets graves et profonds abordés, met merveilleusement en scène, dans ce troisième roman, les deux combats de sa vie : la liberté et la musique. 
 
Roger Ventós, le fabuleux baryton que se disputent les plus grandes scènes du monde, voit le jour en 1939 à Sète, fruit de l’étreinte éphémère sur les plages d’Argelès entre un tirailleur sénégalais et une anarchiste espagnole exilée. Pour elle, ex-machiniste de théâtre dans l’ardente capitale catalane, s’ouvre une ère de privations et de solitude, à toujours tirer le diable par la queue, mais la musique est là qui va sauver l’enfant. À l’adolescence du garçon, sa mère est frappée par un mal incurable et l’envoie à Barcelone afin qu’il soit élevé par son oncle dans les coulisses du cabaret où elle a elle-même grandi : le Théâtre des merveilles. Entre mécanismes magiques, décors extravagants et danseuses légères, c’est là, parmi les membres bigarrés de la troupe, qu’il se découvrira une famille aimante pour l’aider à cultiver son inestimable don pour le chant ; et c’est de là qu’il partira conquérir le monde.

Le livre se présente comme une fausse autobiographie et offre une très belle réflexion sur la musique. 

N'hésitez pas à découvrir ses précédents romans, c'est une très belle plume avec un univers romanesque foisonnant ("Les yeux fardés" et "Les femmes de la Principal", tous deux publiés chez les éditions Actes Sud en version poche chez Babel).

VÍCTOR DEL ÁRBOL
Par-delà la pluie
Éditions Actes Sud (mai 2019)

Il faut acheter de toute urgence le dernier Víctor del Árbol ; cet auteur est remarquable en tous points : sens de l’intrigue affuté et parfaitement maîtrisé, travail sur les personnages fouillé et pointu, écriture ciselée et poétique, sens de la petite histoire dans la grande histoire et construction très aboutie.

Dans son nouvel opus, il tisse une intrigue dans laquelle il sera notamment question de tenter de refermer les blessures traumatisantes de l'enfance, et de personnages complexes, généralement marqués par la vie mais qui tentent une hypothétique résilience. 

Un livre dense et bouleversant abordant le pouvoir de la mémoire, le déterminisme social, les relations père-fils, la dépendance, la liberté individuelle, la transmission, la culpabilité face à l'histoire et plus particulièrement les stigmates de la guerre d'Espagne.

Résumé :
Miguel et Elena se rencontrent dans une résidence séniors à Tarifa. À court de temps, ils décident de s'épauler pour solder leurs comptes avec la vie et se jettent sur la route au volant d'une flamboyante Datsun de 1967. Direction Madrid, Barcelone et Malmö, en quête des vérités qui blessent et d'un amour qui tue.

À relire du même auteur, le très beau "La Tristesse du Samouraï", éditions Actes Sud, ci-dessous. 

VÍCTOR DEL ÁRBOL
La Tristesse du Samouraï
Éditions Actes Sud (2013)

Espagne 1941 : Une femme élégante sur un quai de gare au petit matin, dénote parmi des passagers apeurés qui n’osent croire que la guerre est finie. Isabel fait partie du clan des vainqueurs et n’a rien à redouter de ces phalangistes arrogants qui arpentent la gare en ce rude hiver 1941. Elle presse la main de son plus jeune fils et écrit à l’aîné, qu’elle s’apprête à abandonner, les raisons de sa fuite. Le train en direction de Lisbonne partira sans elle.
L’enfant rentrera seul chez son père, appâté par le sabre de samouraï qu’un homme vient de lui promettre. Isabel disparaît pour toujours. Quarante ans plus tard une autre femme a commis un meurtre et doit comparaître devant la justice des hommes mais pour cette brillante avocate, cela n’a guère d’importance. Elle est atteinte d’une tumeur cérébrale et c’est à sa mémoire qu’elle doit des comptes...
Trois générations marquées au fer rouge par une femme infidèle. L'incartade a transformé les enfants en psychopathes, les victimes en bourreaux, le code d'honneur des samouraïs en un effroyable massacre. Et quelqu'un doit laver le péché originel.

"La Tristesse du Samouraï" est un roman noir rare remarquablement écrit, et un intense thriller psychologique qui mène les personnages aux limites de leurs forces pour sauver l’honneur de la lignée.

JAUME CABRÉ
Confiteor
Éditions Actes Sud (septembre 2013)

Je vous envie d’avoir à découvrir ce joyau de la littérature, une œuvre-monde dont le personnage central, un violon, nous permet de traverser des époques, des lieux, des histoires remarquables et inouïes, tout cela porté par une écriture à priori complexe, mais qui, après un petit effort de quelques pages, devient fluide et incandescente.
Juste avant de perdre la mémoire, Adria (un homme) se met à l’écriture d’une longue lettre à l’amour de sa vie, pour lui expliquer son parcours, ses décisions et surtout certains faits cachés, presque inavouables, qui ont marqué son existence.

Un violon, une médaille et un morceau de tissu sont les éléments clés de ce récit, prenant
et émouvant. Adria révèle le chemin parcouru. Adria Ardèvol est un jeune barcelonais, élevé par des parents exigeants, qui manifestent des attentes énormes pour leur unique enfant. Le père veut que son fils devienne un humaniste polyglotte et la mère veut faire d'Adria un virtuose du violon. 

Au centre de ce livre : Sara, la femme à qui s’adresse cette longue confession, ce Confiteor aux nuances musicales envoûtantes. 
Sara, la femme présente et même l’absente, celle qu’Adria aime par-dessus tout. 
Confiteor est un extraordinaire roman d’amour, l’histoire d’une passion dévorante, douce dans ses présences mais douloureuse dans ses absences. 
Mais aussi Bernat Plensa, l’ami fidèle.
Confiteor est un roman d’amitié !
L’amitié entre Bernat et Adria traverse le temps et les tempêtes. 
Sans oublier Lorenzo Storioni, luthier de profession, et bien évidemment, le violon ! Confiteor, c’est aussi l’histoire de ce violon, personnage presque central du roman. 
Un violon, des musiques, tout le roman aurait pu être écrit sur une portée, aux vibrations des notes d’une sonate de Schuman ou d’un trio pour violon de Schubert.

Un violon qui nous transporte au XVIIe siècle où l’on tue pour le posséder mais aussi, au milieu des camps de concentration ... où la mort est aussi prétexte au vol, à l’extorsion. Confiteor est un roman musical ! C'est aussi une quête de la vérité, d’une vérité cachée derrière l’opacité de l’histoire et du présent. 

En plus des histoires d’amour et d’amitié, en plus des mystères qui entourent son passé, Adria nous révèle graduellement le long chemin parcouru pour découvrir la genèse de la fortune familiale ; c’est une véritable enquête culturelle à travers les siècles.
Adria garde jusqu'au bout une foi intacte en l'art et la musique, qu'il voit comme une "façon de s'entendre avec la vie, avec les mystères de la solitude, avec la certitude que le désir ne s'ajuste jamais à la réa­lité"
Share by: